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P comme PARISSaint Germain-des-Prés |
Un exemple
des |
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L'Abbaye fut fondée en 543 par le Roi Childebert, fils de Clovis,
à la demande de l'évêque Germain pour recevoir les
reliques de la sainte Croix et de saint Vincent de Saragosse dont elle
prendra le vocable. Elle recevra celui de saint Germain après que
des miracles fussent observés à proximité de sa sépulture. De la basilique mérovingienne il ne reste de visible que quelques
colonnes de marbre remployées dans le choeur et quelques traces
dans les fouilles du sous-sol. Le rigoureux clocher de l'an mille nous
introduit au roman monastique. Les restes du porche du XIIe cachés
sous le porche de 1607 nous livre une des clefs du premier gothique. Le
porche franchi, on découvre la nef romane (sauf les badigeons qui
sont du XIXe). Les colonnes divisent la nef en travées bien distinctes,
une première en occident. Le nombre de moines augmentant, le choeur
roman en cul de four est remplacé par un vaste choeur gothique,
la même année que la pose de la première pierre de
Notre-Dame (1163). Un bourg s'édifie autour du monastère
dès le VIe siècle. (D'après "Paris, son Église et ses églises" par Bernard Violle). L'orgue avant la Révolution
L'instrument fut commandé à Pierre THIERRY
qui voulait faire là son chef-d'uvre : sommier à
doubles gravures, grand Écho à 7 jeux, tirasse mobile.
Comme le grand sommier est à doubles gravures, Thierry innove en alimentant les basses des deux jeux de 16' en utilisant deux gravures. Dans le dessus, c'est le Récit par emprunt de 5 jeux du Grand-Orgue. Alors que l'achèvement avait été prévu à la fin de 1662, ce ne fut que le 26 juillet 1663 que fut plantée la première cheville du buffet après démolition et reconstruction de la tribune. L'orgue ne fut reçu qu'en 1667, Alexandre Thierry achevant seul les travaux suite au décès de son père en 1666 et à la mésentente avec ses frères.
L'orgue continue à être entretenu par Alexandre jusqu'à sa mort en 1699. Cependant, probablement avec son accord, Jean BROCARD, un frère du tiers-ordre, effectuera quelques travaux : - pose d'un Cornet séparé et d'une
trompette en cuivre au Récit, Après la mort d'Alexandre, les moines reconnaissants
furent les rares clients à rester fidèles à la famille
Thierry en la personne du neveu François. Après Thierry, l'orgue sera entretenu par Nicolas
SOMER. A la mort de celui-ci, les fils seront évincés par
CLICQUOT auquel on fit appel pour une restauration importante vers 1772. C'était ainsi un orgue en parfait état et
de premier ordre quand survint la Révolution.
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Positif | Grand Orgue | Bombarde | Récit expressif | Pédale |
Montre 8' Bourdon 8' Salicional 8' Prestant Doublette Plein-Jeu V Nasard Trompette Clairon Cromorne |
Montre 16' Montre 8' Bourdon 8' Flûte 8' Prestant Doublette Fourniture V Cymbale IV Nasard Cornet V Trompette Clairon Voix-Humaine |
Bourdon 16' Bombarde Trompette Clairon + Cornet (en 1820) |
Bourdon 8' Flûte 4' Nasard Trompette Hautbois |
Flûte 16' Flûte 8' Flûte 4' Bombarde Trompette Clairon + Quinte 5'1/3 en 1820 |
Tremblant - Rossignol |
Une autre restauration plus complète fut entreprise en 1841 par
la Maison DAUBLAINE & CALLINET sur les plans de DANJOU titulaire depuis
1834.
Il ne subsiste plus que 19 jeux de l'orgue de Saint Germain, mais pas
pour longtemps.
L'incendie du 16 décembre 1844 dû à la maladresse
de BARKER* détruisit tout ce qui restait de l'uvre des Thierry**,
des Clicquot et Dallery.
(*) Lors du réglage de sa "machine"
, Barker laissa tomber la bougie qui l'éclairait.
(**) Sauf les deux Trompettes qui sont à Saint Merry
Saint
Victor, comme Saint Germain, avait des orgues bien avant le XVIIe siècle,
mais ils restent mal connues
Le 12 avril 1679 un buffet neuf est commandé au
menuisier Étienne CARREL. Ce meuble est plus original encore que
celui de Saint Germain. C'est un 16 pieds en montre aussi, mais disposé
plus en largeur. La tourelle centrale du grand buffet est en cercle complet
et les tourelles latérales sont à deux étages, ce
qui représente un exemple unique.
Le positif est semblable à celui que possédait Saint Germain
mais à tourelle centrale unique à 5 tuyaux.
Le tambour d'entrée est, lui aussi, magnifiquement sculpté
et on peut le voir encore au bas de la nef de Notre-Dame des Blancs Manteaux.
Alexandre THIERRY fut chargé de construire l'instrument le 30 avril 1679 sur les indications de LEBEGUE.
Positif | Grand Orgue | Cornet séparé, 25 notes |
Écho 32 notes |
Pédale 30 notes |
Montre 8' Bourdon 8' Prestant Doublette Fourniture III Cymbale III Flûte bouchée 4' Nasard Tierce Larigot Cromorne Petite Voix Humaine 8' |
Montre 16' Bourdon 16' 8' ouvert Bourdon 8' Prestant Doublette Fourniture V Cymbale IV Nasard Quarte Tierce Flageolet Cornet V Trompette Clairon Voix-Humaine |
Cornet V Petite Trompette (pour imiter le hautbois) |
Cornet V | Flûte 8' Trompette |
Claviers en os de 48 notes de Ut - Ré à Ut5 - 2 Tremblants |
En 1772 l'orgue de Saint Victor fut confié à
Jean-Jacques BEAUVARLET-CHARPENTIER qui fit aussitôt entreprendre
une grande réfection par François-Henri CLICQUOT :
- Positif agrandi en hauteur, Flûte 4', Doublette, Larigot et Voix-Humaine
font place à Dessus de Flûte 8', Trompette, Dessus de
Hautbois.
- Au G.O., au lieu de Flûte 4', Flageolet et Voix-Humaine, Clicquot
place une double Tierce et une 2e Trompette.
- Hautbois au Récit à la place de la Trompette qui
passe à L'Écho à la place des IV rangs supérieurs
du Cornet, auquel il ajoute une Flûte 8' et un Clairon.
- La Pédale reçoit les deux jeux manquants sur les places
libres, Flûte 4' et Clairon.
Au début de la Révolution, l'orgue est en bon état.
La démolition de l'abbatiale décidée, les facteurs
SOMER et CHEVALLIER durent démonter l'orgue et l'entreposer au
"Cabinet des Machines" alors rue de l'Université. On
le destinait aux savants de ce qui deviendra le "Conservatoire des
Arts et Métiers" pour servir de noyau à un orgue modèle
aussi complet que celui de Saint Sulpice. Ce projet n'eut pas de suite.
Il fut alors transféré vers le dépôt du prieuré
de Saint Martin des Champs.
En 1802 on rendit le rang de paroisse à l'église
de l'ancienne abbaye Saint Germain .
Il ne pouvait être question de ramener l'orgue aliéné.
Il fallait en trouver un autre selon le même procédé.
On se mit en quête dès 1804 mais les temps étaient
passés et il ne restait plus grand chose de disponible qui fut
complet et en bon état. Seul l'orgue de l'abbaye Saint-Victor répondait
à peu près au désir. Il avait été démonté
pour procéder à la démolition de la vieille abbaye
rivale et dormait au dépôt du Conservatoire des Arts et Métiers.
En 1804, cet orgue de valeur mais entreposé depuis
8 ans était le dernier grand instrument disponible. La "succursale
de Saint Germain des Prés" l'obtint du ministre de l'intérieur
au prix d'un grand affolement au Conservatoire où un conservateur
tient toujours à garder le contenu de ses dépôts.
En outre, il y eut des vols que l'on aurait préféré
tenir ignorés en haut lieu. Il manque quelques tuyaux de Montre,
les plus gros, du 8', du 4', du Bourdon de 16', etc. Il faut bien avouer
la chose au ministre et le gardien indélicat identifié écopera
2 mois de prison.
Somer prendra livraison de l'orgue de Saint Victor et le transportera
à Saint Germain.
Pour compenser les pertes chiffrées à environ 400 kg d'étain,
le ministre fait livrer en plus ce que Somer a pu dénicher dans
le dépôt : 214 livres de plomb, 79 d'étain, 2
grands soufflets provenant des Cordeliers et ... 12 grilles de fer de
18,70 mètres de long sur 1 mètre de haut.
Somer
se mit au travail.
Il avait tiré du Conservatoire le buffet complet et nous sommes
assez surpris que le buffet établi que nous voyons actuellement
n'ait rien de commun avec celui de Saint Victor. D'ailleurs il porte gravée
l'inscription "1810", date de sa construction sous l'empire.
Le plan même ne ressemble qu'en gros à la disposition ancienne,
probablement à cause des contraintes imposées par une voûte
trop basse. En revanche, on y retrouve toute la grande statuaire dans
des attitudes un peu changées. Nous ne savons rien du Positif non
plus. Somer l'a-t-il réutilisé ? Refait de neuf ?
Nous n'avons aucune image de son aspect avant sa disparition en 1862.
Seul subsiste le saint Victor, relégué en haut du grand
corps où il est presque invisible.
Pour l'instrument, Somer a été plus conservateur.
Ainsi retrouve-t-on au Grand-Orgue le sommier à 17 chapes de Saint
Victor sur lequel, en sacrifiant la Quarte, il put disposer en fond de
sommier le seul jeu qui y manquait : la Voix-Humaine. Celle
qu'il avait fabriqué pour l'orgue du "Théâtre
de la République" (la Comédie Française).
Le Récit, porté à 32 notes (La à Mi) fut augmenté
d'une Trompette et d'une Flûte.
L'Écho resta inchangé et l'étendue de la Pédale,
dont 4 tuyaux d'anche seulement sur 60 avaient survécu, fut ramenée
à 2 octaves (de Fa à Fa) pour une Trompette de 12'
et un clairon de 6' et à 18 notes pour les Flûtes
de 8' et de 4'.
Au Positif, on retrouve les 10 jeux de Saint Victor.
En 1823, un relevage s'impose.
Louis CALLINET se chargea de ce travail qu'il n'acheva qu'en 1829. Ce
fut une remise en état complète avec peu de changements.
Au Grand-Orgue apparaît une Bombarde d'une taille énorme.
Les Fournitures et Cymbales y sont devenues 2 mixtures II/V.
La Pédale a reçu une Flûte de 16' et une Bombarde,
à partir du premier Ut.
Récit et Écho restent inchangés si ce n'est la perte
du Bourdon d'Écho.
Au Positif, aux 10 jeux de Saint Victor sont ajoutés un Cornet
III, un Clairon et un Basson. Fourniture V et Cymbale III
y sont concentrés en un Plein-Jeu V. D'où un bouton
"Tacet" (muet).
En 1862, la remise en état confiée à Jean-Baptiste STOLTZ fut en fait une reconstruction complète dans le style nouveau, symphonique.
Elle s'inscrivait dans un programme de "restauration"
de l'église romane au cours duquel BALTARD avait condamné
la tribune et le Positif dorsal. Il fit réaliser en remplacement
un vaste plancher à balustrade sculptée de style "roman" ( ! ).
Le facteur dut se contenter du grand buffet pour y loger l'orgue prévu
à 3 claviers. La création d'un Récit expressif complet
l'amena à transformer en boîte tout l'espace supérieur
sous la voûte par une simple façade de jalousies. Stoltz
y plaça son Positif derrière, étouffé par
le Récit et soumis à la même expression, négation
de la notion même de Positif.
Tout a été changé et le matériel antérieur
remployé, modifié, est devenu méconnaissable à
l'oreille.
Cet orgue d'une lourdeur certaine allait toutefois connaître une
célébrité grâce à André MARCHAL
qui ne put s'en satisfaire longtemps et qui confia en 1922 à Joseph
GUTSCHENRITTER quelques directives pour une esthétique néoclassique
naissante.
Puis Marchal passa à Saint Eustache. Il fut remplacé quelques
mois par Jean LANGLAIS avant que ce dernier soit nommé à
Sainte CLOTILDE.
Antoine REBOULOT dut se contenter après lui de cet orgue resté
hybride et qu'il quitta sans regret lors de son départ pour l'étranger.
En 1963, la grande restauration était devenue inévitable
et un programme plus "néoclassique" était confié
à la Maison HAERPFER & HERMANN.
Différentes causes retardant l'exécution, sinon le principe
et l'enveloppe du programme, Odile BAILLEUX et le clergé prirent
conseil auprès de René DELOSME et d'André ISOIR afin
de ne pas se contenter d'un néoclassicisme teinté d'alsacien
et de baroque pour repenser une composition plus originale.
On pensait alors à l'exécution correcte de
la musique française sans pour autant renoncer aux polyphonistes
ni être incapable de jouer les romantiques et le répertoire
conçu pour des orgues néoclassiques. Non pas un orgue à
tout jouer, absurde par définition, mais un propos inverse :
priorité à la musique française et additions complémentaires
compatibles pour l'interprétation de musiques d'un autre style.
C'est ce programme que mit en chantier la Maison HAERPFER en 1973.
Traction mécanique intégrale (sauf quelques
jeux sur moteurs), 4 claviers de 56 notes.
Restitution d'un positif de dos dessiné pour abriter un 8 pieds
en montre*, un clavier de Bombarde, véritable plan de Résonance,
un Récit expressif, et une solide Pédale :
Positif | Grand Orgue | Bombarde | Récit expressif | Pédale |
Montre 8' (H) Bourdon 8' (St) Prestant (St) Doublette (H) Plein-Jeu VI (H) Flûte 4' (St) Nasard (H) Tierce (H) Larigot (H) Dessus de Cornet III (H) Trompette Clairon Cromorne |
Montre 16' (St)
(façade de Somer) Montre 8' Flûte à cheminée 8' (St) Prestant (St) Doublette Grosse Fourniture III 2'2/3 (H) Mixture VII/VIII 1'1/3 (H) Voix Humaine (So) |
Bourdon 16' (St) Bourdon 8' (St) Flûte 4' (St) Double Tierce (H) Nasard (H) Quarte (St) Tierce (H) Sifflet (H) Cornet V (St) (Bourdon ancien) Bombarde 8/16' (C) Trompette (So) 2e Trompette (H) Clairon (C) |
Viole 8' (St) Céleste (St) Bourdon 8' (St) Prestant (St) Flûte 4' (St) Flûte 2' (H) Dessus de Cornet V (H) Cymbale V (H) Bombarde (St) Trompette (St) Clairon (St) Basson/Hautbois |
Flûte 16' (St) Soubasse 16' (H) Quinte 10'2/3 (St) Principal 8' (G) Bourdon 8' (H) Principal 4' (H) Mixture VIII 2' (H) Bombarde Trompette Clairon (St) |
Tremblants I, II & III - 4 tirasses
- Accouplements I/II, III/II, IV/II - Appels d'anches et de mixture
de Pédale. En vert, les jeux anciens subsistant. Jeux de Somer (So), de Stoltz (St), de Callinet (C) , (G) Gutschenritter, (H) Haerpfer. Bien sûr, tout ceci remis en état, complété et réharmonisé. Ce n'est pas une restauration d'orgue historique. |
Ce
plan peu ordinaire avec sa division du Grand Orgue en deux claviers comme
dans les orgues Brabançons classiques, l'un pour le Plenum, l'autre
pour le Grand Jeu, l'équilibre très classique de son Grand
Jeu avec 2 Trompettes puisqu'il y a une Bombarde, le maximum de facilité
de registration compatibles avec le principe de la traction mécanique
poussée à sa plus grande légèreté ...
enfin une composition très réfléchie des Mixtures
hors de tout à-priori historique, tout cela en fonction des effets
à obtenir, l'écriture harmonique française s'accommodant
sans peine d'autres schémas que les siens propres.
Au Grand-Orgue, la Fourniture est une Cymbale ascendante avec 3
demi-recoupes en Fa2, 3 et 4.
La Mixture est une Cymbale VI à doublures de quinte, horizontale
pour la basse, puis ascendante en deux paliers avec resserrement et descente
du rang grave au 8' pour éviter la résultante de 16'.
Au Positif, le Plein-Jeu VI est une Cymbale IV légèrement
ascendante à 4 demi-recoupes, à doublures de quinte et des
alternatives de resserrement par une doublure d'octave, puis deux dans
l'aigu.
La Cymbale V du Récit est du même type, ascendantes
à 4 demi-recoupes mais sans doublures, donc plus aiguë, avec
resserrement par doublure du rang grave à partir d'Ut4.
La Mixture de Pédale VIII a aussi une demi-recoupe en Sol2
et pratiquement 3 doublures (2 de quinte) passant progressivement des
rangs aigus aux graves.
En tout, une grande unité recourant nettement à l'ascendance
et aux larges paliers. Quinconces des recoupes pour masquer les sauts;
insistance délibérée sur les quintes qui, contrairement
aux idées reçues, donnent plus de corps et de médium
que de brillance. Enfin, parti pris de plafonds peu élevés,
sous le 1/8' sauf au dessus du Récit.
Seule serait à regretter l'absence d'une tierce étroite
"à mettre dans le Plein-Jeu" à la Titelouze
ou à la De Héman.
Compilation de la brochure de Pierre HARDOUIN "L'orgue de Saint Germain des Prés Les Paris" - Connaissance de l'Orgue, 1978