ABéCéDaire de l'orgue |
|
Histoire des Orgues de Saint Nicolas des Champs |
|||||||||||||||||||||||||
Une statue de Sainte Cécile Nous allons tenter de le faire ressortir à la place qu'il mérite d'occuper en fait d'orgues historiques dans le contexte du grand Paris, zone si pauvre en instruments authentiquement anciens et franchement typés. Cette étude repose essentiellement sur celle que Pierre Hardouin a publié en 1977. Des orgues existent à Saint Nicolas des Champs depuis
1418, celles achetées à Bernard de MONTIGNY,
des orgues médiévales à Plenum sans registres, que
nous retrouvons en 1536 ayant besoin de réparations. L'orgue de Jacques PIGACHE, en 1571,
|
Clavier "plein" 44 notes, Fa1 à Ré5 | Pédale 9 notes en SiFaUt |
Principal 12' (entièrement posté) Muzette* à l'octave 3' (basse et dessus) |
Flûte 8' |
Tambourin (2 t. de pédale) Rossignol de 3 tuyaux Tremblant pour faire tourner les étoiles, faire lever les bras des anges tenant les trompettes et faire lever le bras de Saint Nicolas en forme de bénédiction, faire branler la barbe aux deux masques. |
C'est à cette date aussi que l'église est agrandie vers
l'est, le côté ouest étant bloqué par la rue
Saint Martin.
Tous les moyens passant en frais d'agrandissement, ce n'est qu'après
1600 que l'on s'occupa à nouveau du mobilier.
Un
nouvel orgue fut commandé entre 1608 et 1611 au plus prestigieux
Facteur d'orgues de l'époque, Paul MAILLARD. Mais,
à la suite de la découverte du marché de Pigache,
il est fort probable que son intervention a été beaucoup
moins importante qu'on ne l'imaginait avant.
Il s'agissait probablement de mettre l'orgue de Pigache au goût
du jour et d'en faire un orgue à 3 tourelles rondes "à
la Flamande" de même hauteur.
Sur les dômes latéraux, des aigles dont le regard est maintenant
dans le vide regardaient à l'origine ce que Hardouin pense avoir
été un Sauveur sur la tourelle centrale. Pour ma part, j'opterai
plutôt pour un Saint-Jean à qui ces animaux sont aussi associés
et qui était un Saint Patron de cette église au moins aussi
important que Saint Nicolas à l'époque.
On peut penser qu'à cet occasion, le Saint Nicolas bénissant
aurait été déplacé, peut-être supprimé
ainsi que les figures articulées
Les tourelles latérales datent de cette construction et le soubassement
actuel, la tourelle centrale (en 12 pieds à l'époque) ainsi
que les pilastres cannelés qui encadraient la Montre de 12' et
les plates-faces pourraient bien être une survivance de l'orgue
de Jacques Pigache.
Les claviers devaient toujours commençer au FA.
Tous ce que nous savons est que cet orgue possédait une batterie
d'anches de très grand modèle: Bombarde, jeu qui
disparaîtra de l'orgue Français pour un siècle par
la suite, Trompette, Clairon, Cornet V au Mi.
Mais, dès 1628, les Marguilliers qui veulent toujours rivaliser avec les paroisses riches de Paris envisagent à nouveau la construction d'un orgue neuf et à la nouvelle mode auprès du vieux Crépin CARLIER dont les tarifs restaient archaïques.
Le marché est passé en 1632.
La construction d'un orgue complet nécessitait un buffet de Positif
et l'agrandissement du grand corps. Probablement avec Montre de 4', ce
positif n'existe plus, mais le grand corps subsiste tel quel, entre les
ailes ajoutées en 1776. La tourelle centrale rehaussée pouvait,
dès lors, abriter les basses d'une montre de 16'.
Comme il n'y avait plus assez de place pour le Sauveur (ou Saint Jean)
sur la tourelle centrale, il est remplacé par un Saint Nicolas
bénissant assez trapu et penché en avant, qu'on peut toujours
voir.
Si la tribune d'origine était plus haute, elle aurait
été abaissée à ce moment là à
son niveau actuel.
Les plates-faces sont modifiées d'un seul tenant pour abriter les
tuyaux de plus grosse taille qui étaient dans la tourelle centrale.
Le
sculpteur Jean NOYER, artisan de ces modifications, a probablement réalisé
dans la foulée les anges musiciens (démesurés) qui
sont au dessus des plates-faces et les atlantes qui supportent les tourelles
latérales, ainsi que les guirlandes de fruits et les cartouches.
Le Saint Nicolas et les anges musiciens articulés ont-ils disparu
ou, rendus immobiles, seraient toujours ceux de Pierre Rendu ? Une
analyse de restes de peintures lors de la restauration nous le précisera.
Le sommier contint 51 gravures, non qu'il y ait eu plus de 48 notes, mais les claviers comportaient des feintes brisées pour différencier les ré# et les mib aux 3 octaves supérieures. Ceci dénote non pas un accord Pythagoricien comme le pense Hardouin, mais plutôt un accord mésotonique à 8 tierces pures.
La composition
du G.O. était la suivante:
Plenum: Montre 16', Bourdon 16', 8' ouvert, Bourdon 8', Prestant,
Doublette, Fourniture V, Cymbale III, Tierce 1'3/5 étroite.
Mutations: Flûte 4', Nasard, Quarte, Tierce (large), Flageolet
1', Dessus de Cornet V, 25 notes de ut3 à ut5 jouable également
par un demi clavier de récit.
Anches: Trompette, Clairon, Cromorne, Voix Humaine.
Au Positif:
Plein-Jeu: Bourdon 8', Montre 4', Doublette, Fourniture IV, Cymbale III.
Mutations: Flûte 4', Nasard II (avec la Quarte), Larigot, Tierce
de grosse taille coupée.
Voix Humaine 4'
A l'achèvement, Nasard et Quarte étaient sur deux chapes
distinctes et un Cromorne a été ajouté.
Pédale:
29 notes, ut à fa,
Flûte 8' ouverte, Flûte 4', Sacqueboutte (trompette).
15 ans après sa nomination, Nicolas GIGAULT fit réaliser
en 1688 des travaux assez conséquents par Antoine VINCENT
:
reprise de l'harmonie des anches, décalage et incorporation de
la tierce étroite dans le Plein-Jeu et, à sa place, pose
d'une double-Tierce 3'1/5, réfection du sommier de pédale
avec ravalement au LA et ajout d'un Clairon, pose d'une trompette et d'une
Flûte de 8' sur le petit sommier à double effet qui faisait
parler le dessus de Cornet de Récit, et qui seront joués
par un quatrième clavier en débranchant la possibilité
de jeu à partir du 2e clavier. Ajout d'un cinquième clavier
pour jouer un écho à deux registres. C'est assurément
le premier orgue à 5 claviers de Paris ... et du Monde.
En 1700, après un retour des DUCASTEL, l'entretien de l'orgue est confié à Robert CLICQUOT, un paroissien.
En 1732 un marché
est passé avec le cadet de la famille, Louis-Alexandre CLICQUOT,
pour un relevage complet :
Augmentation des claviers au ré5 en profitant des 3 gravures de
ré# et suppression des feintes brisées, remplacement de
la Voix-Humaine de Positif par une Trompette pour éviter de mettre
le Cromorne dans le Grand-Jeu;
Récit sur sommier neuf à 5 chapes:
- Bourdon permanent, Prestant, Cornet III, répondant au 3e clavier,
- Flûte et Trompette d'écho répondant au 4e clavier.
Au moment où d'autres orgues en viennent à 5 claviers, Saint-Nicolas
revient à 4 !
La Pédale est descendue au sol° en sacrifiant deux notes aiguës
(Sol° - Ut).
L'orgue a été remis en état mais non transformé
et ne possède toujours pas de Bombarde de Pédale alors redevenue
à la mode.
En 1765, la soufflerie
rendit l'âme!
On fit alors venir le fils de Louis-Alexandre, François-Henri CLICQUOT,
paroissien aussi, qui refit les soufflets à neuf, ceux de CARLIER
n'en pouvant plus.
C'était le premier pas vers une rénovation.
Le marché pour un orgue neuf fut passé le 16 janvier 1772 mais le devis ne nous est pas parvenu, ce qui laissa planer jusqu'à nos jours tant de légendes quant à sa composition, notamment celle des Pleins-Jeux que l'on pensait absents alors qu'une observation même superficielle laisse apparaître au moins 5 rangs au positif et 9 au Grand-Orgue. On a alors prétendu que Clicquot avait décidé de ne pas les poser au dernier moment. On le connaissait mal. Il aurait posé de nouvelles chapes.
Le
menuisier BOREL a la charge de l'agrandissement de l'ensemble de la tribune
et de l'entrée : porte, tambour, plafond de l'entrée, selon
les plans de l'architecte RICHARD, de la dépose et du remontage
du buffet au gré du facteur, "en utilisant les anciens ornements".
Le grand corps fut avancé et prolongé jusqu'aux murs latéraux
par des ailes ajourées en Montre de Pédale. Un positif neuf
avec Montre de 6' comporte les mêmes décorations que les
ailes, au goût du temps : de gros pompons aux claires-voies à
draperies ou festons.
Le programme instrumental fut conforme aux plus impérieuses des
nouveautés intervenues dans l'orgue Français de paroisse
après 1750.
Tous les sommiers sont neufs, à l'exception de celui de Récit
dont la composition était maintenue.
Tous les tuyaux sont neufs, et tous faits en étain (sauf ceux en
bois, évidemment) à l'exception d'une partie de la Flûte
d'écho en étoffe de VINCENT.
A nouveau 5 claviers,
50 notes de ut à ré, sans premier ut#, un grand sommier
en 4 parties de 100 gravures et de 20 chapes pour le GO et la Bombarde.
Une expertise, en 1984, nous a révèlé la composition de l'orgue tel que sorti des mains de Clicquot. Elle vient contredire en partie certaines affirmations erronées et tenaces !
La composition suivante est donnée dans l'ordre des chapes, de la façade vers le fond.
Une asterisque indique les jeux intacts et à leur place d'origine à deux exceptions près : le Hautbois du Positif et la Flûte de 8 du Grand-Orgue.
Positif 50 notes, U1t à Ré5 |
Grand-Orgue 50 notes, Ut1 à Ré5 |
Bombarde (6) 50 notes, Ut1 à Ré5 |
Récit 32 notes, Sol2 à Ré5 |
Écho (8) 32 notes, Sol2 à Ré5 |
Pédale Anches= 30 notes, La0 à Ré3 Flûtes= 21 notes La0 à Fa2 |
---|---|---|---|---|---|
*Cornet V (27 notes) *Montre 8 (6 en montre)(1) *Prestant 4 *Bourdon 8 Basson-*Hautbois *Nasard Quarte de Nasard(2) *Tierce *Flûte 8 (Dessus au Do3)(3) *Cromorne Fourniture IV - 2'(4) Cymbale IV *Trompette *Clairon |
*Grand Cornet V (27 notes) *Montre 16 *Bourdon 16 *Montre 8 Bourdon 8 *Prestant *Flûte 8(5) *Grosse Tierce *Nasard *Quarte *Tierce Doublette Fourniture IV Cymbale V *1e Trompette *2e Trompette *Clairon *Voix-Humaine |
*Bombarde 16 *Trompette 8 |
*Bourdon 8 *Cornet IV(7) *Hautbois Flûte 8 |
Bourdon *Flûte *Trompette |
*Flûte 20' (bouchée)(9) Flûte 10' Flûte 5' (10) *Bombarde 20' *Trompette 10' *Clairon 5' |
(1) A l'origine avec
emprunt des basses au Bourdon. Par la suite, le toit du Positif
a été réhaussé pour loger des basses
en bois sur les côtés (Dallery ?). |
(5) Devenue dessus du Bourdon 8' ("Bourdon-Flûte" de Gonzalez) | (6) Les gravures sont inversées par rapport à celles du GO. Ut à gauche, Ut# à droite. Sommier central en mître pour les graves. | (7) 5 rangs
avec le Bourdon sur registre séparé. ( DGW : J'aurais une certaine tendance à penser qu'il s'agit là du Cornet de Louis-Alexandre Clicquot). |
(8)Sommier de Vincent à l'origine en mître, réordonné en demi-tons par Gonzalez. | (9) 20,
10 et 5 pieds puisque ravalés au La0. (10) Au GO dans le "Gros Nasard" de Gonzalez, avec le dessus de Bourdon du GO manchonné en Flûte par Dallery. |
*36 jeux parfaitement authentiques sur 47. (48 registres avec le tremblant doux).
Seul le démontage nous donnera
la composition et les reprises du Plein-Jeu, mais la résultante
de 16 est attestée à la fourniture du Positif par la
présence de tuyaux marqués "5 1/3" dans la Flûte
que Dallery a tiré des tuyaux de celle-ci, en majorité de
la Doublette. Sur le premier Ut, les 4 rangs de Fourniture du Positif
sont : 2', 1', 2/3', 1/2'.
Nous en déduisons que la Fourniture du Grand-Orgue devait résulter
en 32 pieds, ce qui peut s'expliquer par le fait que l'on peut considérer
l'orgue de Saint-Nicolas comme un orgue de 20 pieds de par la présence
d'un ravalement de pédale au La0, y compris pour les fonds. On
y verrait volontier, en attendant d'en avoir une preuve, un plan semblable
à celui de Poitiers
, mais commençant
une quinte ou une octave plus bas et moins "cymbalisé".
Il est fort probable également que le nombre élevé
de rangs des Cymbales permettait d'utiliser ces dernières seules,
comme Fourniture-Cymbalisée, et que leurs rangs graves devaient
doubler des rangs aigus des Fournitures.
On compte 10 soufflets pour alimenter cet instrument sans secousse ni houppements, dont il résulte "des Bombardes extraordinaires et d'un éclat capable d'effrayer".
L'orgue passe
la période révolutionnaire sans encombre et le "citoyen"
MOLLARD le juge de premier ordre en l'an III.
L'église est affectée au Culte de la Fertilité.
De 1804 à
1825, DALLERY se charge de l'entretien régulier.
A cette date on entreprend une remise en état du décor de
l'église et c'est là que le buffet reçoit cette superbe
couleur chocolat "afin de l'embellir".
Un devis de travaux nécessaires à la remise en état
après 50 ans de service entraîna:
au Positif,
- la suppression du Plein-Jeu (avec sa Doublette) qui n'était qu'une
"survivance de la barbarie gothique",
- Suppression de la Quarte de Nasard qui deviendra dessus de Flûte au Grand-Orgue,
- pose d'un beau Dessus de Flûte 8' en partie tiré des tuyaux
de Doublette de la Fourniture, sur la chape de la Quarte.
- Déplacement de la Trompette sur la chape de Fourniture,
- Déplacement du Hautbois sur la chape de Cymbale,
- Déplacement du Cromorne à la place de la Trompette,
- ajout d'une Clarinette (probablement de Clicquot) sur la chape du Hautbois.
Au Grand-Orgue,
- Disparition complète du Plein-Jeu et de la Doublette au profit
d'un Dessus de Flûte 8' (39 notes) en remplacement du dessus de Flûte de Clicquot et tirée de la Quarte du Positif,
- Manchonnage du dessus de Bourdon à cheminée en Flûte ouverte.
- Dédoublement de la Bombarde sur le registre de Cymbale (ce qui
fait qu'on peut toujours voir les trous de chape de la Cymbale entre les
pieds de Bombarde),
En 1839, succédant à Louis BRAILLE, Edouard
BATISTE réclamait avec insistance la transformation de son orgue.
La situation resta bloquée 9 ans. De guerre lasse, BATISTE obtint
un orgue selon son goût ... à Saint Eustache !
Son successeur WACKENTHALER, devant la nécessité de réparations,
put en 1854 s'adresser à la Maison DUCROQUET dont
le conseiller artistique DANJOU avait des opinions assez conservatrices
pour convenir à l'impécuniosité de la Fabrique.
- Réfection des 15 tuyaux de Montre des tourelles,
- Pédalier à l'allemande, mais de même étendue
que l'ancien,
- Sommier complémentaire derrière l'orgue pour des fonds
de Pédale avec 6 jeux neufs (27 notes, sans ravalement): Flûte
ouverte 16', Contrebasse 16', Flûte 8', Violoncelle 8', Flûte
4', Gambe 4'.
Est-ce au cours de ces travaux que fut également changée
la soufflerie, sous forme de deux réservoirs alimentés chacun
par une pompe à bras, à plis compensés et compas
"Daublaine", encore existante ? *
*
On sait maintenant que c'est Merklin qui a posé la soufflerie encore
actuelle, en 1871. Comme ce dernier travaillait à l'orgue de Saint-Eustache
à cette époque et qu'il y a refait entièrement une
soufflerie neuve, on peut penser qu'il a cédé à la
paroisse de Saint-Nicolas-des-Champs deux soufflets de Daublaine de l'ancienne
soufflerie de Saint Eustache.
L'instrument a été restauré par Merklin qui aurait changé les claviers et la soufflerie en 1871. Restauration rendue nécessaire après la guerre de 1870 et la Commune de Paris qui ont occasionnés quelques dégâts.
(Photo communiquée par F.Ménissier) |
Dès la
fin du siècle, l'orgue avait beaucoup dépéri, méprisé
pour archaïsme, considéré comme peu jouable.
Après la guerre de 14-18 il était à peu près
hors d'usage.
La restauration par Victor Gonzalez
La résurrection de l'orgue de Saint
Gervais due
indirectement au bombardement de l'église (dommages de guerre)
s'était inscrite dans un mouvement d'intérêt pour
la facture classique qui rappela au souvenir l'existence, non loin de
là, d'un orgue classique encore plus Clicquot et tout aussi intact,
à Saint Nicolas.
Après d'âpres discussions, en 1926, une majorité
(de ce qui n'était pas encore la Commission des Orgues) s'était
faite autour de l'idée qu'il ne fallait pas modifier l'ensemble
sonore du Clicquot mais se prononça pour :
- la réfection à neuf de la mécanique avec machines
Barker, des claviers porté à 56 notes. (Les anciens claviers
étaient restés abandonnés derrière l'orgue
et ont réchauffé le sacristain pendant le rude hiver de
1940).
- ajout d'un récit expressif à jeux du XIXe siècle.
Le
travail a été confié à Victor Gonzalez qui
fit là ses premiers pas en matière de restauration d'orgues
historiques:
- Mise au ton par décalage de la mécanique,
- Claviers neufs à 56 notes, réordonnés: Positif
- Grand-Orgue - Récit - Bombarde - Écho,
- Pédalier neuf de 32 notes,
- Machine Barker pour 3 tirasses (Positif, Grand-Orgue et Récit expressif) et les accouplements,
- Registres à traction pneumatiques et 6 combinaisons fixes,
- Compléments aigus à traction pneumatique tubulaire sur
des petits sommiers ajoutés et suspendus dans les buffets de GO
et de Positif.
La composition
a subit les modifications suivantes:
- Suppression du Cor Anglais du Positif au profit d'un Plein-Jeu (III),
(probablement la Clarinette posée par Dallery),
- Transfert de la Voix Humaine du GO au Récit expressif,
- Pose d'un Plein-Jeu V neuf au GO. Les deux Pleins-Jeux auraient dû
"être identiques aux jeux correspondant de l'orgue de la
Cathédrale de Poitiers".
- Suppression des 3 jeux de Gambe de Pédale et reconstitution du
Bourdon 8' et de la Soubasse 16'.
- Récit expressif neuf, derrière l'instrument existant
et répondant au même clavier que le Récit classique
(deux Récits sur un seul clavier): Flûte Creuse 8', Bourdon
8', Céleste, Flûte octaviante 4', Flageolet 2', Plein-Jeu
III, Basson 8/16', Trompette, Clairon, Basson-Hautbois et la Voix Humaine
déplacée du Grand-Orgue.
Joseph BONNET était totalement opposé à
cet ajout comme à la mise au ton par décalage mais ne convainquit
pas la majorité ni le Docteur BEDARD ni WIDOR.
Lors de la réalisation, il y eut quelques entorses
au programme malgré la procédure de classement comme monument
historique.
La semelle du soubassement de l'orgue de PIGACHE fut tranchée*,
à l'avant pour y placer la console avec le pédalier
(voir encart, plus haut), et à l'arrière
pour y placer la machine Barker.
Les deux cornets de GO et de Récit furent posés sur moteurs
pneumatiques.
* Cette "tranche" laisse apparaître
les cernes du bois, ce qui pourrait nous fournir l'occasion d'une datation
par dendrochronologie.
Comme le décalage d'un ton entier ne correspondait pas tout à
fait au diapason moderne, tout l'accord fut donc descendu aux tuyaux et
la pression ramenée à moins de 75 mm. Rudolf Von BECKERATH
qui travaillait alors chez Gonzalez a pu témoigner du caractère
hasardeux de certaines réharmonisations des Montres à pression
basse, mais obtint qu'aucun tuyau ne soit pavillonné ou entaillé
ni aucune bouche retouchée.
Les tuyaux de l'ancien Ut1 sur la gravure alors inutilisée, ainsi
que ceux de ravalement de pédale ont disparu. ("Quel poids
de métal !" aurait dit Hardouin). Heureusement, pour
retrouver le diapason authentique, il reste les premiers UT de Montre
16' et 8' qui ont été simplement débranchés
(et un tuyau de bois du Bourdon de pédale qui sert de marche-pied
dans le Récit expressif).
Le rajout de Plein-Jeux neufs avec un nombre de rangs aussi réduit
posait des problèmes et le plan de Poitiers ne fut aucunement respecté;
ce furent deux cymbales ascendantes à l'allemande auxquelles on
fit dépasser dès Fa4 le plafond classique. En compensation,
le Plein-Jeu du Récit expressif passa de 3 à 5 rangs avec
un plan néoclassique.
Plus grave fut la pose d'un double-Nasard 5'1/3 ("Clicquot ne
l'avait-il pas oublié?") sur la chape de Doublette et
en retaillant les tuyaux manchonnées en Flûte du dessus de
Bourdon 8' qui furent remplacés à leur tour par ceux du
Dessus de Flûte de Clicquot.
A la Pédale, le Bourdon 16' est intact sous l'appellation
Soubasse. La Flûte 4' ancienne s'est envolée, l'actuelle
ayant été refaite avec des tuyaux de Gambe retaillés*.
Le Bourdon 8' a été reconstitué à partir de
la Gambe 8' et la Flûte 16 est en partie l'ancien Violoncelle grossi
et dont des tranches, sciées (il est en bois), sont encore sur
le toit de l'orgue.
(*Nota) D'après l'observation
minutieuse de François Ménissier, l'actuel titulaire
de l'orgue avec Vincent Janvrin, c'est la Contrebasse de 16 qui
s'est envolée. La Gambe 4 se retrouve dans la Voix Céleste
du récit de Gonzalez, la Flûte de 4 est intacte (et
non confectionnée avec la gambe recoupée!) et 18 tuyaux
du Violoncelle de 8 se retrouvent aussi au récit expressif
dans la Dulciane de Gonzalez.
L'inauguration du 21 février 1930 réunit, malgré leur désaccord, WIDOR jouant ses uvres et Joseph BONNET qui ne toucha pas un instant le Récit moderne. La réussite de la restauration n'aurait déjà soulevé qu'un enthousiasme mitigé pour ce résultat.
Par la suite, l'orgue, trop tôt déréglé
malgré sa nouvelle jeunesse, ne joua pas le rôle que ce qui
lui restait d'authenticité aurait permis. Il fut en outre le mal
aimé de son clergé qui l'enferma dans un rôle strictement
liturgique de plus en plus réduit.
La nomination de CHAPUIS en 1955 fit lever des espoirs mais non les barrières
et celui-ci ne tarda guère à s'évader vers une tribune
à plus vaste auditoire et pour un orgue plus vivant. Son suppléant,
philosophe de métier, dut se contenter de joies artistiques confidentielles.
La
démission officielle de CHAPUIS en 1972 ouvrit, sur concours, la
tribune à Jean BOYER dont les efforts de remise en état
de l'instrument permirent, après un premier concert en 1973, l'enregistrement
d'un disque qui prouve que le Clicquot de Saint Nicolas n'est malgré
tout pas mort.
Ecouter
la Fantaisie et Fugue de APF Boëly, un enregistrement STIL. Attention:
4735 Ko
C'en est malheureusement un peu resté là et, suite à
la sécheresse de 1976, l'orgue serait devenu totalement muet si
des expédients n'avaient pas été appliqués
pour le maintenir vaille que vaille. Ainsi l'isolation de l'alimentation
en vent du Récit expressif qui fuit de partout, afin que le reste
soit à peu près alimenté convenablement.
Suppression des compléments aigus tubulaires qui menaçaient
ruine au dessus des tuyaux de Clicquot,
Et par la suite, astreinte à de longues séances de rustinage
et usage de kilomètres de ruban adhésif pour essayer d'étancher
la vieille soufflerie de Daublaine ainsi que les moteurs de la machine
Barker et ceux des tirages de registres qui n'en peuvent plus.
A la tribune, il n'y a que l'orgue qui manque d'air, pas ceux qui y uvrent.
Peut-être aussi parce que la pression a été sérieusement
rehaussée en rajoutant des poids sur les réservoirs, la
portant pratiquement à ce que le ventilateur est capable de délivrer.
Et combien d'élastiques de slip pour aider la mécanique
à remonter au niveau de l'abrégé ...
Mais aussi il n'y a pas eu que des cessations d'activité:
les panneaux de fond, déplacés par DUCROQUET derrière
sa Pédale, ont retrouvé leur place d'origine derrière
l'orgue de CLICQUOT, isolant la Pédale de Ducroquet qui se débrouille
très bien pour passer par dessus. La Voix Humaine "voyageuse"(*)
a repris sa place au Grand-Orgue. Reconstitution de la soupape du tremblant
doux de Clicquot. L'une et l'autre avec tirage à l'aide d'une cordelette
de rideaux.
Détournement de la tirasse Récit (expressif) en Tirasse
Bombarde. Ajoutons à ceci le gros travail d'entretien, la remise
en forme des languettes d'anches et l'application d'un accord légèrement
inégal dérivé de RAMEAU que Philippe HARTMANN avait
effectué jusqu'en 1975.
(*) La seule Voix Humaine qui ait pris le métro
dans une valise afin d'améliorer,
lors de concerts, un autre orgue de Paris.
Maintenant, autre temps et autre liturgie, Boyer est parti ("On est passé du vulgaire au nul !" disait-il) et c'est Vincent JANVRIN qui veille aux destinés de ce vénérable ancêtre.
Ecouter le Grand-Jeu, un des plus fabuleux.
La différence de
sonorité (présence sonore) par rapport à la Fantaisie
et Fugue de Boëly est uniquement due au déplacement de la
paroi du fond de l'orgue dont la profondeur a été diminuée
de moitié.
Autres extraits en fin de page.
Peut-on
espérer bientôt à son chevet des médecins capables
de le guérir d'un âge qu'il porte gaillardement et aussi
des expédients qui ont de plus en plus de mal à lui maintenir
une respiration difficile ?
Les grandes lignes du traitement sont faciles à établir:
- Retour à une mécanique classique et des
5 claviers dont le modèle existe encore à Nantes. Avec ou
sans tirasses ? (Tant qu'à faire du neuf, autant
prévoir des tirasses!)
- Restauration totale de la soufflerie et retour à une pression
adaptée. La question de la restitution d'une soufflerie à
10 soufflets cunéiformes ne devrait pas se poser. Clicquot avait
posé 10 soufflets pour obtenir un vent égal. Un simple réservoir
de Ducroquet alimenté par un ventilateur électrique assurerait
parfaitement cet objectif.
- Restitution du diapason authentique et des tuyaux disparus, afin de
retrouver un ré aigu, le Clicquot s'arrêtant à l'Ut5
avec le diapason moderne.
- Restitution du ravalement de Pédale.
- Reclassement des 3 Flûtes impliquant la suppression du Gros-Nasard
inutile et restitution de la Doublette dont il occupe la place.
- Restitution de Pleins-Jeux classiques, 9 rangs au Grand-Orgue en remettant
la Bombarde à main sur une seule chape, l'autre étant occupée
par celui de Gonzalez, et 8 rangs au positif, ou 4 rangs + une Doublette
ou encore IV comportant une Doublette si l'on ne veut pas se priver d'une
superbe Flûte de Dallery et qu'on ne peut pas, de ce fait, déplacer
le Hautbois.
- Restitution de la Flûte du Récit qui a disparu.
- Et, bien sûr, disparition du Récit expressif, sans regrets
pour son buffet en Fibrociment ni les étais qui le soutiennent
depuis l'origine afin qu'il ne s'effondre pas. On peut seulement garder,
au musée (des Arts et des Techniques, voisin ?), la machine
Barker qui est une tentative intéressante de Barker à traction
progressive.
En fait, les médecins sont prêts à intervenir, le
diagnostic est fait.
Le Docteur DECAVELE a prescrit: "Si, sur quelques
points de détail de composition, il peut apparaître des divergences
entre des textes et la lecture des sommiers et des tuyaux, il est juste
de donner plus d'importance à la notion de conservation du patrimoine
et de faire prévaloir, dans un ordre de préséance,
la tuyauterie existante, suivie de la lecture des sommiers et enfin des
documents ..."
Alors, qu'attend-on ? (*)
(*) Le bon vouloir de la Ville de Paris !
Extraits de "Sei Gegrusset" enregistré en 1983:
Jeux de fonds.
(1227 Ko)
Flûtes (de Dallery). (983 Ko)
Les Tierces. (788 Ko)
Voix Humaine. (1035 Ko)
Flûte du positif, Nazard du Gd Orgue, Cornet du Récit et
Bourdon 16 à la pédale. (1892 Ko)
Trompettes. (1035 Ko)
Grand Jeu. (1275 Ko)
Extraits enregistrés en 1989:
Fonds et récit de Trompette de Bombarde. (680 Ko)
Flûtes "de Dallery" et Hautbois du Récit. (522
Ko)
"Ça ira" avec le Chur de Trompettes. (532 Ko)
Ça ira, ça ira ... jusqu'à quand ?
(Aux dernières nouvelles, novembre 2004, ça ne va plus du
tout !).
En 2006, la mécanique et la soufflerie ont été revues.
En 2007, les tirages de registres pneumatiques vont être remis en
état afin d'entendre l'orgue dans toute sa majesté, en vue
d'une restauration que l'on espère, maintenant, prochaine.
Bonne nouvelle, non ?
DGW - qui a maintenu cet orgue en état de marche
bénévolement pendant 17 ans et qui, comme les amoureux déçus,
ne se remet pas d'avoir été plaqué!
Révision 30 mai 2007
- 12 nov.2007
Compléments sur l'orgue de Jacques Pigache en juillet 2007.
L'orgue
de choeur de Saint-Nicolas-des-Champs.
Un des tous premiers John ABBEY, en 1845.