Traité de l'Orgue de Marin Mersenne

PROPOSITION XIX. Expliquer les différents intervalles ou degrés que font les différents tuyaux d'Orgue lors que l'on leur donne le vent différent.

L'expérience enseigne que les tuyaux que l'on embouche ou à qui l'on envoie le vent par la pression plus ou moins forte des soufflets, produisent des vents différents. Il y en a qui montent plus haut d'un demi ton que leur son naturel et ordinaire, d'autres montent plus haut d'une quinte, d'une octave, d'une douzième ou d'une quinzième comme il arrive aux flûtes et aux trompettes. Mais il est difficile d'expliquer pourquoi tous les tuyaux ne font pas les mêmes intervalles, comme font toutes les trompettes.
Les tuyaux ouverts tant gros que petits montent à l'octave si tant qu'on pousse le vent un peu plus qu'à l'ordinaire, sans qu'ils puissent monter à la tierce, à la quarte ou à la quinte. Ceux qui sont bouchés montent toujours à la quinte ou à la douzième. Il sera plus aisé d'en trouver la raison lors que l'on connaîtra la qualité des tuyaux qui sont cause de la différence de ces tons.
(Maintenant, on le sait ! Voir "paramètres sensibles").
Les tuyaux ouverts qui sont fort courts, comme ceux dont la largeur est égale à la hauteur, ne peuvent monter par dessus leur ton naturel alors qu'ils montent aisément lors que leur longueur est quadruple ou quintuple de leur largeur. Les tuyaux dont la bouche est trop ne peuvent aussi octavier et quelques uns ont remarqué que les tuyaux à anche montent souvent à la tierce majeure lors qu'on veut leur faire prendre leur ton naturel.
J'ai un tuyau dont la longueur est octuple de la largeur qui monte premièrement à l'octave avec un vent plus fort, puis il fait la douzième en redoublant le vent, et finalement il monte jusqu'à la quinzième. Il a 3 lignes en diamètre et 1/2 pied de hauteur.
Il est aisé d'éprouver toutes les autres hauteurs et d'observer toutes les différences qu'y apportent les différentes largeurs et hauteur des bouches et des lumières.