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D'après le Compte-rendu de la réunion du
GAM du 27 juin 1969 Lien: http://www.lam.jussieu.fr/ J'ai demandé à Madame Castellengo l'autorisation de reproduire ces éléments. Si vous voulez vous en servir, c'est à elle qu'il faut demander. Bien avant le LAM de Jussieu, Aristide Cavaillé-Coll
avait fait un certain nombre d'observations que l'on peut consulter là: Rubriques : (Clic! sur la "puce"
Pages
annexes:
Généralités L'étude expérimentale des tuyaux à
embouchure de flûte présente des difficultés presque
insurmontables quand il s'agit de flûtes soufflées à
la bouche par un musicien. Avant l'établissement d'un son stable, le tuyau émet
une série de transitoires: c'est "l'attaque", qui peut
être précise, tardive, bruyante, octaviante ...
Comme pour tout instrument de musique, le tuyau d'orgue
associe un excitateur à un corps
sonore ou résonateur. Un tuyau sonore fonctionne selon plusieurs modes vibratoires
qui correspondent à une certaine répartition des noeuds
et des ventres de pression à l'intérieur du tuyau (*). En théorie, un tuyau tronconique ouvert à ses deux extrémités présente la même série de partiels que le tuyau cylindrique de même longueur, mais, dans la réalité, il n'est pas indifférent que l'on embouche ce tuyau par le petit ou le gros bout. (*) Voir les lois classiques des tuyaux sonores à "loi des tuyaux". - L'excitateur, ou le système lame-d'air / biseau.
Lorsque l'on associe un résonateur au système lame-d'air / biseau, les deux parties réagissent l'une sur l'autre. Le fonctionnement de l'ensemble se complique. Deux modes de fonctionnement se superposent et interfèrent: En faisant croître progressivement la pression de
l'air, on entend tout d'abord un son assez faible dont la fréquence
monte avec la pression. Il s'agit d'un des régimes de "son
de biseau", ou "son de bouche", ce que les facteurs d'orgues
nomment "bruit de bouche". La pression d'air augmentant toujours, brusquement les phénomènes changent de nature. Nous entendons de nouveau le partiel 1 (son fondamental) du tuyau mais il est beaucoup plus intense et reste stable pour une gamme de pression beaucoup plus large. Nous sommes passés en régime normal. Le tuyau réagit maintenant
sur le son de bouche en lui imposant sa fréquence. Pour l'orgue, seul le partiel 1 est utilisé en régime
normal (*) mais le régime buccal joue un rôle prépondérant
dans l'attaque du son d'un tuyau. Le régime buccal ne dure quelquefois
que 10 ou 20 millisecondes mais il est parfaitement perçu et intégré
dans la sensation de timbre. Associée à un tuyau, la bouche ne fonctionne plus que sur les fréquences qui correspondent aux partiels du tuyau et aux harmoniques de ceux-ci (N, 2N, 3N etc.).Les partiels sont accrochés en régime 1, 2, ou 3 etc. d'où les sauts. En régime normal, les sons de bouche sont beaucoup plus aigus que le fondamental du tuyau. Dans l'exemple ci-dessus, si N = DO3, on aura, en régime buccal, DO3, DO4, SOL4, DO3, puis, en régime normal DO3, DO4, etc. Ecouter l'attaque d'un tuyau
de doublette, le temps d'attaque a été considérablement
allongé en mettant le ventilateur en route afin d'établir
lentement la pression:
PARAMÈTRES
LIES A LA COLONNE D'AIR - Le tuyau ou résonateur Les lois relatives aux tuyaux sonores considèrent
des tuyaux ouverts aux deux bout, ou ouverts à un bout et bouchés
à l'autre ou bien fermés aux deux bouts. ... que se passe-t-il dans un tuyau ouvert aux deux bouts
lorsqu'on ferme progressivement une extrémité ?
Passage du tuyau ouvert au tuyau fermé
Lors du recouvrement graduel de l'extrémité
ouverte, le son baisse de façon continue mais pas régulière.
Tant que le rétrécissement n'a pas atteint la valeur de
la moitié de la surface totale de l'extrémité, l'effet
est peu perceptible. La moindre fuite d'air dans la calotte d'un bourdon (tuyau
d'orgue bouché à son extrémité supérieure)
en change considérablement l'accord ainsi que la sonorité
car le tuyau parle alors très mal. Pour l'orgue, le rapport de la section de la bouche sur la section du tuyau est généralement compris entre 0,30 et 0,15, c'est à dire la bonne zone au delà de laquelle les partiels sont plus justes mais le débit d'air trop important (tuyau "égueulé") et en deçà de laquelle le tuyau parle très mal et les partiels sont très faux.
Quand on fait varier la longueur de
la cheminée, au fur et à mesure du raccourcissement,
la fréquence du fondamental monte mais le timbre change, les partiels
étant affectés d'une manière différente. Les
harmoniques impairs se renforcent au fur et à mesure que la fréquence
monte. Quelques explications sur la signification du graphique précédent ? Voir solfège sonagraphique !
Quand le rapport est grand, entre 20 et 30, le tuyau est
dit "de petite taille" et inversement. C'est le diamètre
qui est petit ou gros. Du chapitre précédent il résulte qu'à
surface de bouche égale, les tuyaux de grosse
taille auront des partiels plus faux que les tuyaux de petite taille
pour lesquels le rapport des sections (bouche et tuyau) sera plus grand. La "fausseté" des
partiels conditionnent le timbre du son: En bref, plus les partiels 2, 3, 4, ... d'un tuyau sont
proches des harmoniques du partiel 1, plus les harmoniques du son du tuyau
sont nombreux. C'est généralement le cas des tuyaux de petite
et de moyenne taille (les Gambes, les Prestants, ...). Donc, ceci explique pourquoi les timbres des tuyaux de taille large sont plus pauvres en harmoniques que les tuyaux de taille étroite. La richesse harmonique d'un tuyau n'est donc pas due à sa taille intrinsèque mais à la concurrence des partiels avec les harmoniques du fondamental. S'ils correspondent, ils se renforcent, s'ils ne correspondent pas, ils s'affaiblissent ou s'annulent. Ecouter successivement 5 tuyaux
donnant la même note: un Bourdon (en bois), une flûte
à cheminée, un prestant ("Principal"),
une flûte à fuseau (Flageolet avec "biseau"
muni de dents), une flûte large (Quinte 1'1/3 pas très
bien harmonisée!): PARAMÈTRES LIES AU SYSTÈME EXCITATEUR
Pour les tuyaux de bois, l'air est conduit par un tube,
généralement court, et arrive dans une cavité - la
chambre - et sort par la lumière.
A l'expérience on isole le
son de bouche en bourrant le résonateur avec du coton.
Quand on admet de l'air dans un tuyau
avec son résonateur, au départ, la composante la
plus grave (régime 1) est généralement faible. Le
bruit se situe dans la partie aiguë du spectre. La qualité de l'attaque d'un son de bouche dépend
donc étroitement du son de bouche. S'il est très faible
en intensité, le son du tuyau est long à s'établir.
S'il est très intense et très riche en harmoniques, on entend
à l'attaque du tuyau un grand nombre de sifflements qui subsistent
dans le son normal sous forme de grésillements. Si le son de bouche
comporte beaucoup de bruit, on entend à l'attaque une sorte de
percussion brève. (*) Quid des sons additionnels et différentiels ? Clic !
En (a) le son de bouche accroche le partiel 4 du tuyau. Le fondamental du tuyau démarre le premier. En (b) le son de bouche est plus aigu et il accroche le partiel 5. L'harmonique 2 du tuyau démarre le premier et reste plus intense. La durée d'attaque est réduite de moitié. En (c) les fréquences du son de bouche sont devenues des bandes de bruit. Aucun partiel n'est nettement accroché. L'attaque est très brève et se réduit à un spectre de bruit. Le tuyau a tendance à octavier. Les harmoniques 2, 4 et 6 sont prédominants. Pour trouver la pression optimum, on agit sur l'ouverture
du pied.
Le pied du tuyau a un double rôle:
- A longueur normale (20 cm, lire "200 mm" sur le graphique) le son de bouche est riche en harmoniques; l'attaque est franche. - Réduit à 7,2 cm, le son de bouche renferme beaucoup de bruit que l'on retrouve dans le son du tuyau. Ce dernier est pauvre, instable et s'établit difficilement. - Pratiquement sans pied (1,5 cm) le son de bouche n'est plus qu'une bande de bruit. Le tuyau souffle péniblement et ne fournit plus que deux harmoniques. Le pied est un véritable tuyau
sonore ouvert aux deux bouts ayant ses propres partiels. Dans la pratique, la longueur minimum du pied s'établit aux alentours de 20 cm. (DGW: J'en conclue que si les partiels du pied sont en accord avec les partiels du résonateur, on aura un tuyau avec un spectre très riche, dans la mesure où ce sont les partiels du pied qui déterminent les partiels du son de bouche).
Vitesse de l'air à la sortie de la lumière
Fermer le pied a un effet identique à baisser la pression dans le sommier de l'orgue. L'intensité est plus faible, l'attaque est molle, les harmoniques supérieurs apparaissent avec un retard notable. Agrandir la lumière diminue le retard du fondamental, les sons de bouche disparaissent et l'attaque est plus nette. Il y a un peu de bruit d'écoulement que l'on ne perçoit plus à quelques mètres de distance.
Exemple du "Plein-Vent": Prenons l'exemple d'un tuyau dont le pied est fermé
et qui parle bien à pression élevée dans la gravure
(*); si on ouvre le pied et que l'on baisse la pression dans la gravure
afin que la pression dans le pied soit la même, l'attaque est très
nette et le spectre, plus riche, est influencé
par les partiels de la gravure, ce qui ne se produit pas pied fermé. Forme de la lumière, rôle des "dents"
Lorsque les arêtes sont vives et tranchantes, le son de bouche est riche en fréquences aiguës que l'on retrouve, accompagnées de bruit, à l'attaque du tuyau. Elle produisent des battements avec les harmoniques du tuyau. Le son est riche mais instable. Le tuyau grésille. Si l'on pratique de petites entailles ("dents") sur le plan incliné du fond, le jet d'air s'écoule suivant des vitesses différentes et il se forme des tourbillons qui s'opposent à la production de fréquences aiguës. Il y a renforcement du régime 1 dans le son de bouche. L'attaque est plus sûre mais parait plus molle. L'intensité du fondamental est renforcée et les harmoniques sont plus stables. En revanche, la perte d'harmoniques aigus font que la sonorité du tuyau est plus sourde, plus terne. Il est à préciser que les dents pratiquées pour cette expérience étaient exagérément profondes afin d'accentuer les différences. Pour l'harmonisation d'un tuyau il conviendra d'avoir la main légère et de savoir émousser l'arête du fond juste de la quantité nécessaire.
L'opération consiste à avancer ou à reculer la lèvre supérieure par rapport à la lumière (le tuyau est en étain, donc tout mou, c'est facile à faire). Quand la lèvre supérieure est tout à
fait rentrée, tout l'air passe devant et il n'y a aucun son. A l'exception de l'harmonique 2 qui est très renforcée quand la lèvre est en avant, le timbre ne change pas. Seule la durée d'attaque est affectée.
Aplomb de l'arête du fond par rapport à la lèvre inférieure Là, l'opération est plus délicate(*). Il s'agit de remonter ou de descendre légèrement le fond en appuyant sur ses bords pour ne pas le déformer au milieu. Le changement de la hauteur du fond agit sur la quantité
d'air qui entre dans le tuyau, sur la forme de la lumière et sur
l'orientation de la lame d'air, ces facteurs étant déterminants
dans la formation du son. On agit sur trois paramètres simultanément. (*) C'est l'opération la plus délicate de l'harmonisation, d'autant plus qu'un côté peut n'être pas au même niveau que l'autre. Un des moyens de s'assurer du bon aplomb du fond est de souffler de la fumée de tabac dans le tuyau. Ce qui a valu à Cavaillé-Coll, et par voie de conséquence à tous les facteurs d'orgues, le bénéfice d'une Bulle Papale afin de l'autoriser à fumer à l'intérieur de l'église pour l'exercice de sa profession. Modification de la hauteur de bouche: égueulement
Quand on égueule un tuyau: On peut rattraper une bouche un peu haute en augmentant la pression d'air au pied, mais la fréquence fondamentale augmente encore, le tuyau est plus fort, ce qui peut faire désordre dans l'harmonie d'un jeu.
Ce sont deux petites plaques d'étain soudées de part et d'autre de la bouche du tuyau. On peut les rapprocher ou les éloigner pour régler la hauteur du son fondamental du tuyau en modifiant le "domaine" de la bouche. On peut agir ainsi sur près d'1/4 de ton. Pour une flûte à cheminée, lorsque l'on rapproche les oreilles, on abaisse la fréquence du partiel 1 d'une plus grande quantité que le partiel 2. On peut donc accorder ces deux partiels l'un sur l'autre de façon à faire disparaître les battements. Le son devient stable et parait plus riche. C'est un petit tube que l'on dispose horizontalement devant la bouche de tuyaux généralement de taille très fine et pour lesquels on préfère conserver une bouche basse pour favoriser leur richesse harmonique: Gambe, Salicional, ... Sans rouleau, de tels tuyaux octavient ou sont trop faibles. Le rouleau permet d'augmenter la marge de stabilité en pression du régime 1, le réglage du tuyau en est facilité. Il est moins tardif et a moins tendance à octavier. Le rouleau n'agit pas sur la richesse spectrale. Sa place est assez critique et il est souhaitable de pouvoir le régler en hauteur et en profondeur. Ce chapitre aborde un aspect particulier du rôle du matériau de constitution du tuyau dans la mesure où, faute de pouvoir reproduire deux fois une bouche parfaitement identique, il n'est pas possible de comparer un tuyau en zinc, en étain, en cuivre, ... Seule donc la modification du corps sonore peut être envisagée, comme celle de l'état de surface des composants de l'excitateur sans en changer les paramètres de réglage.
Si la paroi en étain du tuyau est remplacée
par une paroi en une matière vibrante ou déformable, tel
que du papier par exemple, la fréquence change. Donc, pour des raisons de stabilité en fréquence et de qualité du son, il est souhaitable que les parois ne vibrent pas de façon notable. Sur ce plan, l'étain présente une inertie suffisante pour empêcher les réactions des parois sur l'onde stationnaire. Rôle de l'état de surface du matériau
Amortissement à l'intérieur du tuyau: L'état de surface à l'intérieur du
tuyau détermine son rendement. Cette expérience explique le timbre particulier des tuyaux en métal "martelés" par rapport au métal raclé et surtout la perte de sonorité des tuyaux couverts de poussière.
État des arêtes de la lumière: Le dépôt de poussière au niveau de la lumière provoque une diminution du débit d'air et altère le son du biseau, ce qui aboutit à une perte de fréquences aiguës. Si un orgue "se fait" avec le temps, c'est plutôt la poussière qui "fait l'orgue".
L'expérience a été conduite en recouvrant
la lèvre supérieure d'un tissu très fin afin d'arrondir
l'arête et de provoquer une diffusion des filets d'air.
CONCLUSION
Nous n'avons traité ici qu'un aspect du problème, à savoir le réglage d'un tuyau isolé et nous sommes encore loin de la belle simplicité que certains imaginent quand ils prétendent que placer dans l'orgue des tuyaux sortant de l'atelier est suffisant à son harmonie.
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